[Foire aux vieux papiers de la Croix-Rousse]

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localisation Bibliothèque municipale de Lyon / P0759 FIGRPT2327 01
technique 1 photographie positive : tirage noir et blanc ; 15 x 20 cm (épr.)
description Le vendeur de partitions musicales.
historique La Croix-Rousse a la pêche. Son marché quotidien, ses rues comme un peu escamotées par des recoins souvent inattendus, sa gouaille débordant le matin des cafés réjouissent tous les amateurs du "bien vivre à l'ombre de son clocher". Depuis deux ans déjà, les Croix-Roussiens pure souche ont une raison supplémentaire de "ne descendre qu'une fois de temps en temps en ville faire leurs courses" comme ils disent là-haut. Et les Lyonnais d'en bas, toutes les raisons du monde, eux, de faire la grimpette... Depuis que le plateau fait, deux jours par mois, la foire aux vieux papiers, la Croix-Rousse est démangée par la collectionnite aiguë. Prière, pour apprécier, d'être passionné, fouineur assidu et du genre bavard. Le soleil actuel se chargeant de vous fidéliser à jamais. Samedi donc. L'un de ces premier et troisième samedis du mois quasiment sacrés pour les fanas de paperasses en tous genres. Picotée de soleil, la place des Tapis, lieu de la fête, fait un peu laissée pour compte sous ses platanes comparée à la grand-messe de la bouffe au grand air sur le trottoir d'en face. Qu'on ne s'y trompe pas. La foire aux vieux papiers est comme qui dirait le dessert bimensuel du marché du plateau. Après la razzia sur les radis nouveaux et les barquettes de fraises, on passe aux choses sérieuses. Après le panier, on va remplir sa tête, et fourrager plus ou moins savamment parmi les vieilles BD, les illustrés, les journaux jaunis, ou encore des tonnes de cartes postales. "Ca n'est pas un bon jour... Avec le week-end de Pâques, la moitié des stands ne sont pas là ! D'habitude, le trottoir est plein". Peu importe finalement. Mis à part l'effet visuel. On butine gentiment d'un stand à l'autre. De l'animation en plus sur le plateau ? C'est ce que voulait il y a deux ans la mairie en parrainant la création d'une association, celle des "amis de la foire aux vieux papiers", soit une vingtaine de collectionneurs chevronnés, amateurs du dimanche écumant régulièrement toutes les brocantes et autres ventes de la région. "A force de se croiser d'une foire à l'autre, on a fini par se connaitre les uns les autres", explique M. Merigot, le président de l'association "il n'y avait plus rien dans le genre. Le marché de Vaise venait de mourir définitivement... De là à souhaiter lancer quelque chose ensemble !". Dénominateurs communs des exposants associés : peu d'entre eux sont croix-roussiens, mais tous adorent le plateau, son ambiance. Tous sont des mordus insatiables croulant sous leurs collections et dévorés par le besoin de partager. Partager leurs acquisitions (moyennant finance tout de même), leur connaissance (bien obligé d'en avoir quand comme Henri, dit le facteur, on réunit sur un stand plus de deux mille cinq cents chansons anciennes sans parler de celles restées à la maison...). Partager aussi l'envie de parler, de communiquer. "Je suis mieux là qu'à m'ennuyer chez moi. Ici je rencontre des gens. Certains sont même devenus des bons copains. On échange des cartes. Certains m'en vendent." Le grand Aymé, qui aime tant à rire de son bien tendre prénom, investit depuis un bail dans la carte postale. "J'en ai cinq ou six mille rien qu'ici. Celles que je ne veux pas garder. Et autant chez moi". Un investissement pointilleux qui amène le monsieur aux frontières de "multiples connaissances". D'un stand à l'autre, on cause. Le soleil y est pour quelque chose. Les poireaux émergent des cabas et les bobs fleurissent sur la tête des enfants. "Ah, quand il pleut, c'est quand même différent !". Henri, le postier, l'allumé volubile et sympa de la chanson ancienne vient de refuser un stock de pièces dites intéressantes. "Il faut que les documents soient en bon état !" Trois mètres plus loin. "Regardez! le vieux papier, c'est un témoignage du temps qui passe, ça fascine tout le monde, les jeunes comme les vieux", analyse un amateur informaticien, lequel depuis dix ans a butiné quantité de vieux livres d'enfants et des documents d'histoire. "Ma passion... Mais je ne peux pas tout conserver : ma femme ronchonne... Alors me voilà, et j'adore ça". La foire aux vieux papiers ? On cultive ici sa passion, on rencontre des gens, et en plus "on prend l'air" comme l'assure, les cheveux au vent et toujours magnanime Gérard Mignot, celui qui fait actuellement des ravages avec ses décorations pour latrines croix-roussiennes. Solidaire des vieux papiers, Mignot. Il a lui aussi un stand où il présente les cartes postales de ses oeuvres... "Et en plus, ce qu'il y a de bien, c'est le café pas loin et les croissants derrière... ! Avouez qu'on est bien ! mieux qu'en ville !" C'est vrai... La "campagne" croix-roussienne a les samedis presque dépaysants... Source : "Les p'tits papiers du plateau" / Sophie Mandrillon in Lyon Figaro, 28 avril 1987, p.38-39.

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